[Détail 1]
Jétais un poisson, je men souviens. Je vivais dans leau (surprise). Leau signifiait beaucoup pour moi (surprise, surprise). Non, vous ne comprenez pas. Arrêtez de ricaner. En tant quhomme, je suis entouré dair, mais seule son absence ou son trop plein se font sentir : lair est neutre, contrairement à leau. A lépoque dont je parle, il ny avait pas de terres émergées, et personne pour nous pêcher. Nous, les poissons, étions insouciants, craignant seulement les plus gros dentre nous. Leau était notre Dieu, le Début et la Fin. Elle nous portait, elle nous nourrissait, elle convoyait vers leur destin notre sperme et nos ufs. Notre métaphysique portait sur un seul point : où leau sarrêtait-elle ? Locéan était sans fond. Les couches supérieures étaient taboues. Quand lun dentre nous sy risquait, il revenait bien vite, terrorisé par des piliers massifs de lumière aveuglante. Les ouïes brûlées par le liquide bouillant, le voyageur nous racontait lenfer qui nous attendait en haut. Et nous restions, respectueux, dans lobscurité froide.
Un jour, quelquun toucha le fond, un peu par accident. Je me souviens que sa famille se vit pousser des pattes. Ils commencèrent, lentement, à grimper le long de la roche, génération après génération, jusquà ce que leau devint chaude et claire, et que loutre-monde se mit à briller. Ils nous envoyaient des rapports quotidiens. Ce nétait pas lenfer, nous disaient-ils. Il faisait bon sentir la terre sous